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En 1990 à la fin de mon cursus ENSIMAG (option Systèmes, Réseaux et Temps-Réel), c'est un peu par hasard que je me suis engagé dans la recherche. Tout d'abord pour faire une thèse dans le cadre une convention CIFRE avec la société Merlin Gerin (devenue depuis Schneider Electric). Le sujet était à la fois très intéressant et dans la continuité de mes stages de Master et de 3A : il s’agissait de transformer un code monoprocesseur de contrôle-commande pour les centrales nucléaires en du code réparti, pouvant s’exécuter avec la même sémantique sur une architecture à mémoire répartie avec un bus de terrain.
Une fois obtenu mon doctorat et après le service militaire, j'ai enchaîné avec un premier post doc dans un laboratoire commun INRIA - Mines de Paris à Sophia-Antipolis avec Gérard Berry, qui est aujourd’hui le titulaire de la chaire d’informatique au Collège de France, puis un second post doc en Californie à l'université de Berkeley grâce à une bourse INRIA et aux excellents contacts entre Gérard Berry et le professeur Edward Lee de Berkeley (comme quoi l’importance du réseau est primordiale).
Comment vous dire ... Berkeley c'était magique, on était en 1996, la Silicon Valleyétait en ébullition, aussi bien sur les plans scientifiques, culturels, politiques …, et d'ailleurs elle l'est toujours ! Surtout, le groupe de recherche où je travaillais était fabuleux et à la pointe mondiale dans le domaine des modèles de calcul pour les systèmes embarqués.
Juste pour l'opportunité d'aller étudier et travailler à l'autre bout du monde je recommande de faire une thèse et un post doc ! Cela m'a aussi permis de constater à quel point le doctorat est le seul diplôme reconnu internationalement. Et c’est encore plus vrai aux USA où dans n'importe quelle soirée les gens ouvrent des grands yeux quand on répond qu'on a un doctorat.
En 1996 j'ai eu la chance immense de réussir le concours de chargé de recherche à l'INRIA, dans le centre de recherche de Grenoble. Dans ce cadre, mes premiers travaux de recherche ont touché à la commande des véhicules autonomes (en particulier pour les autoroutes automatisées) ainsi qu'à la conception les systèmes embarqués, puis aux problématiques de tolérance aux fautes, de sûreté de fonctionnement, d’optimisation de la consommation énergétique et de la température.
En 2005 je suis devenu responsable scientifique d'une petite équipe focalisée sur les méthodes formelles pour la conception des systèmes embarqués. L’apport des méthodes formelles dans ce contexte est de garantir des propriétés clés telles que le déterminisme, l’absence d’inter-blocage, des performances minimales (débit, latence entrées-sorties, temps de réaction, qualité de service, …), des propriétés de sûreté de fonctionnement (fiabilité, tolérance aux fautes, …).Ce qui m'a surtout plu pendant toutes ces années, c'est la liberté totale de travailler sur les sujets de recherche qui me plaisent, de présenter dans des conférences internationales les percées scientifiques auxquelles nous avons contribuées. J'ai ainsi pu travailler dès 1997 sur les véhicules autonomes pour faire du suivi sans conducteur, des fonctionnalités qui commencent à peine à voir le jour dans l'industrie !
Et depuis j'ai tracé ma route à l'INRIA, devenant ainsi délégué scientifique du centre de recherche de Grenoble Rhône-Alpes de 2011 à2015, lourde tâche qui m'a beaucoup occupé mais qui était à tous points de vue passionnante. Avec le directeur du centre, j’ai supervisé la vie scientifique du centre, en particulier la création et l’évaluation par des comités internationaux des équipes de recherche du centre (35 équipes dont 13 créées et 9 initiées sous mon mandat), les relations scientifiques avec nos partenaires académiques (CNRS, universités et CEA) et industriels (grands groupes et PMEs), l’évaluation des chercheurs du centre et le recrutement des nouveaux chercheurs.
En 20 ans de recherche j'ai vu progresser la science informatique, de manière conjointe avec la puissance de calcul, et pour un chercheur, cela conduit à une remise en question régulière et passionnante. J’ai aussi vu évoluer les institutions et les politiques des gouvernements, j'ai vu baisser les financements d'état aux laboratoires et aux instituts, c'est d'ailleurs une politique suicidaire dont on fera les frais d'ici quelques années ; surtout j'ai vu se complexifier les structures et s'alourdir les tâches administratives. Mais en même temps j'ai eu la chance de travailler dans un environnement très privilégié, un centre INRIA, de côtoyer des chercheurs exceptionnels, des gens passionnés par leurs travaux. Mais surtout chercheur est le seul métier dans lequel la liberté scientifique est totale (je pourrais par exemple décider de faire de la recherche en bio-informatique presque du jour au lendemain), ce qui constitue à mes yeux un avantage irremplaçable.
Enfin, pour vous qui êtes à l'ENSIMAG, sachez que vous avez à proximité des laboratoires de rang international, et avec la formation que vous procure l'école c'est une porte d'entrée idéale pour faire de la recherche. Ensuite à vous de vous éclater, à Grenoble et ailleurs.